Une rentrée scolaire sous le signe du racisme d’état !

Dans une note de service datée du 31 août 2023 adressée aux chefEs d’établissement, précédée d’une annonce médiatique quelques jours plus tôt, le ministre de l’éducation demande aux collèges et lycées d’interdire l’accès dans les établissements scolaires aux élèves qui porteraient des « tenues de type abaya ou qamis », considérant que ces vêtements - et surtout le premier - « manifeste[nt] ostensiblement en milieu scolaire une appartenance religieuse ».

Une mesure stigmatisante et discriminatoire

Au nom de la laïcité, le ministère pousse à l’humiliation et à la stigmatisation des élèves. Par cette note de service, qui ne modifie aucun texte réglementaire ni aucune loi, Gabriel Attal n’a pas seulement « interdit » l’abaya : il a ouvert la chasse.

Son message aux chefFEs d’établissement est que toute élève, musulmane ou supposée telle, peut et doit être considérée comme suspecte de prosélytisme religieux ou tout simplement de constituer un « trouble au bon fonctionnement de l’école ». Cette mesure relève donc pleinement de la discrimination raciste et islamophobe : depuis la rentrée, c’est sur la base de la couleur de peau et d’une identité religieuse fantasmée que de nombreuses lycéennes ont été prises pour cible.

C’est également une discrimination sexiste et une vision patriarcale car, une fois de plus, c’est le corps des femmes, d’adolescentes, qu’il s’agit de contrôler. En effet, depuis deux semaines, les témoignages d’humiliation et de discrimination abondent : exclusion d’élèves qui portent des robes, des kimonos, ou tout autre vêtement jugé trop ample, accompagnée d’interrogatoires intrusifs et humiliants sur de prétendues intentions cachées ou sur ce qu’elles ont en dessous de leurs tenues, etc.

Donc, pas de critère mais un point commun de l’aveu même des proviseurEs : les élèves visées sont identifiéEs comme musulmanes. On voit en ces adolescentes de potentielles menaces, comme l’indique l’amalgame abject entre l’abaya et l’assassinat de notre collègue Samuel Paty, enoncé par Macron lors d’une interview.

Une opération médiatique cynique

Au moment où le pouvoir recule sur sa propre réforme du lycée général et technologique et du bac, catastrophe annoncée et combattue dès le début par les personnels, au moment où nous faisons une nouvelle rentrée dégradée par les postes non pourvus et les classes surchargées, au moment où la politique salariale se résume à des pactes dont personne ne veut, ce ministre, faute de projet et de légitimité, cherche à exister par une opération médiatique et une polémique cynique qui recycle les obsessions de l’extrême-droite.

Pour ajouter à la stigmatisation des élèves, le ministère a invité la presse à se rendre dès le premier jour de rentrée dans huit lycées en France, dont le lycée Saint-Exupéry de Marseille. Bilan de cette opération de communication : des reportages où l’on affirme fièrement qu’il n’y aucun incident, que l’ordre règne et que l’école est sauvée. Le ministère peut ainsi se vanter d’avoir réglé un problème qu’il a lui-même inventé !

Mais cette opération médiatique n’est pas pour autant une diversion : elle est au cœur d’une vision de l’école caserne, à quoi contribuent le SNU, l’enseignement des savoirs fondamentaux et la volonté d’un roman national.

Les AED ne sont pas la police du gouvernement

Mais d’ailleurs, qu’est-ce qu’une abaya ? Le ministre ne le dit pas. Il ne le dit pas, car il ne le sait pas. Toute latitude est laissée aux chefFEs d’établissement de déterminer si tel ou tel vêtement, jugé trop long, est un signe religieux ou non. Ce que le ministère ne dit pas non plus d’ailleurs, tant il est éloigné des réalités du terrain, c’est qu’avant même les chefFEs d’établissement, c’est en premier lieu sur les AssistantEs d’Éducation que retombe ce contrôle vestimentaire, bien loin d’une mission d’accompagnement éducatif...

Gabriel Attal a cru rassurer les personnelLEs et les parents d’élèves en promettant le « dialogue » avant les sanctions. Mais quand on connait l’état du « dialogue » sur le sujet ces dernières années, par exemple, aux lycées Victor-Hugo, Saint-Exupéry, Marie-Curie ou encore Denis-Diderot, il est permis de ne pas croire à cette promesse. D’ailleurs, le recteur de l’Académie d’Aix-Marseille l’a confié à certainEs personnelLEs de direction : « L’autorité passe avant la pédagogie. »


Alors que le principe de laïcité à l’école devrait créer les conditions pour développer son esprit critique et s’émanciper, il sert ici une idéologie autoritaire et réactionnaire.

En réalité, la « laïcité et les valeurs de la République », dont se revendique ce ministre et les précédents, ne sont que les prête-noms du racisme, du sexisme et du néocolonialisme, la vitrine d’une école obsédée, du crop-top au voile, par le contrôle des corps féminins et racisés, une école où certainEs élèves ne sont pas considéréEs comme des FrançaisEs à part entière, où les enfants des quartiers populaires ne sont que des émeutièrEs en puissance qu’il faudrait surveiller, civiliser et soumettre. C’est finalement une école qui renonce à sa mission éducatrice et émancipatrice, pour n’être qu’une auxiliaire de police au service d’une idéologie nauséabonde.

SUD éducation 13 soutient et défendra touTEs les élèves et touTEs les personnelLEs qui refusent de se plier à une mesure raciste, sexiste et islamophobe.