Congrès 2016 | De la nécessité de transféminiser nos textes

La transfémination des textes propose une forme de grammaire inclusive, c'est-à-dire qui n'exclut pas les minorités de sexe et de genre et propose au contraire d'ouvrir enfin nos textes à toustes celleux qui souhaitent prendre la place qui leur revient. Il est ici question d'une partie de la population déjà fragilisée par le rejet, l'invisibilité voire les deux. La décision de transféminiser les textes est donc indéniablement politique, tout comme l'était, il y a une quinzaine d'années celle de féminiser les textes et qui déjà à l'époque avait suscité de nombreuses oppositions. Aujourd'hui, les mêmes arguments reviennent :

1 - « Une transféminisation systématique rend nos textes hermétiques voire répulsifs pour des collègues qui estiment que le français prévaut. »

Pour la féminisation, on disait alors pire : « C'est illisible ! Et même si on (le « on » étant à cette époque majoritairement masculin) reconnaît l'importance de l'égalité homme-femme, ce n'est pas de cette manière que l'on arrivera à convaincre ». Les textes de congrès de Solidaires à cette époque gardent les stigmates des débats violents d'alors. Aujourd'hui, cela ne fait plus aucune difficulté, les camaradEs ne sont plus choquéEs par la soit disante illisibilité de nos textes féminisés et même la CGT s'y est mise. Pourquoi ?

  • D'abord parce que les « on » ont peut-être préjugé à tort de l'incapacité de nos lecteurTRICEs à accepter un changement de grammaire. Le plus grand nombre a bien compris que notre grammaire institutionnelle est l'expression d'une domination de genre, et que le « français » ne prévaut pas toujours.

  • Ensuite parce que la lecture, bien que troublante au départ, n'est en fait pas si difficile que cela et que l'on s'y habitue facilement, même si cela demande un effort.

  • Enfin parce que le fond doit toujours primer sur la forme. Qu'est-ce qui est le plus difficile ? De lire un texte transféminisé ou d'exclure de façon soit disant juste formelle une partie des minorités de genre ?

Par contre, il est nécessaire que Sud éducation 13 explique clairement sa démarche, au moins sur une période d'un an, dans toutes ses parutions. Il suffit de systématiquement indiquer dans un encadré la mention suivante :

Sud Education 13 a choisi de transféminiser ses textes. Leur lecture est différente et politique car elle rend visible les multiplicités de sexe et de genre des individus.

2 – « Le rédacteur ou la rédactrice ne sait pas forcément transféminiser et confier ce travail à une tierce personne risque de dénaturer le texte de l'auteur. »

Un argument déjà invoqué il y a quinze ans pour la féminisation des textes, le « je sais pas faire », auquel il suffit en fait de répondre, « eh bien, apprend à le faire » ou « laisse faire quelqu'un d'autre ».

La transféminisation des textes recouvre un travail mené par des militantEs trans et intersexes afin de créer un assemblage des formes masculines et féminines qui les désigneraient. Un autre travail sur la grammaire, la neutralisation, a par ailleurs été mené par d'autres minorités ayant déconstruit intégralement la binarité des genres et proposant d'inventer des pronoms neutres lesquels n'existent toujours pas, ou quasiment, dans la langue française. Ces formes grammaticales sont encore en pleine expérimentation mais on peut proposer des formes transféminisées, elles ne sont ni dogmatiques ni exhaustives. Par contre, elles se veulent un appui, un exemple, un point de départ pour rédiger ou lire nos prochains textes syndicaux.

1. Pronoms personnels

pour reprendre l'adhérentE, on peut utiliser ielle ou ille

pour reprendre les adhérentEs, on peut utiliser ielles ou illes

2. Noms communs

Dans la mesure du possible, il est préférable d'utiliser des termes épicènes- par exemple le lectorat au lieu des lecteurs et lectrices ou sinon d'accorder comme suit en employant un E majuscule : les adhérents et adhérentes deviendra les adhérentEs, et ainsi de suite : professeurE, directeurE

3. Les adjectifs

On prend les deux formes et on les combine :

« Les Adhérents sont contents » devient  « les adhérentEs sont contentEs »

« Les nouveaux adhérents» deviendra par exemple « les nouveauxEs adhérentEs »

« Les merveilleux adhérents » deviendra « les merveilleuxEs adhérentEs »

4. Pronoms démonstratifs

Celui ou celle deviendra cellui

Ceux et celles deviendra cellEux

Enfin, est-il utile de rappeler ici qu'à Sud Education 13 les rédacteurs ou rédactrices des textes n'en sont pas « propriétaires » ? Cela fait longtemps que nous avons décidé de ne pas signer nos textes dans nos parutions, notamment pour le journal, estimant que toutEs les adhérentEs sont propriétaires des textes que nous publions.

Lorsque quelqu'unE soumet un texte à amendements aux adhérentEs, c'est pour qu'il soit amélioré. Transféminiser un texte, c'est l'améliorer, pas le dénaturer.